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Au terme de ce cas clinique, vous aurez revu :
Comment accélérer votre prise en charge de la dépression en MG ?
Pourquoi le rôle du proche est indispensable ?
Quels sont les 3 antidépresseurs, les 2 anxiolytiques et les 2 hypnotiques à connaître pour gérer 99% des cas en MG ?
Comment gérer des idées suicidaires en cs de MG ?
Quand switcher, quand monter les doses, quelle durée prescrire un ATD ?
Vous aurez à la fin du cas :
des fiches de synthèse avec algorithme décisionnel simple à appliquer,
des modèles d'ordonnance type,
les points clefs à retenir,
👉 tout pour gérer au quotidien simplement, rapidement et en mode Evidence Based Medicine (EBM) 😉
Mlle Etienne, patiente de 26 ans célibataire sans enfant, que vous suivez depuis l'âge de 10 ans vient vous consulter car elle n'arrive plus à dormir.
Elle vous rapporte dormir 3 heures par nuit, elle déclare avoir perdu 6 kilos en une semaine et est maintenant à 45 Kg.
Je suis en en « burn-out docteur, j'en peux plus là ! Cela fait une semaine, j'en peux vraiment plus"
Elle met cela en lien avec la fin d’année, elle sera en vacances dans 2 semaines. Ne met pas en avant de conflit environnemental aigu (traumatisme, stress interpersonnel)
A l'interrogatoire, elle a une à deux attaques de panique par jour avec des pleurs quotidiens.
"Je crois que je vais finir par faire comme maman qui s'est pendue"
En lisant son dossier : Elle avait été hospitalisée 1 mois à 15 ans en pédopsychiatrie pour des problématiques suicidaires (aucun compte-rendu). A rapidement mis fin au suivi psychiatrique. ATCD de dépression récurrente chez sa mère avec pendaison à 55 ans. A un arrêt de travail au moins, chaque hiver depuis 6 ans. A toujours refusé tout suivi psychiatrique.
QUE FAITES-VOUS ?
La bonne réponse est A.
Réponse A : Vrai. Il faut PROPOSER une hospitalisation à cette patiente car il existe plusieurs drapeaux rouges très importants et simples à connaître concernant le risque suicidaire.
Si la patiente refuse, c'est autre chose ... mais le proposer et le noter dans votre dossier est important pour vous protéger du point de vue médico légal !
1) ATCD familial de suicide ! 👉 Il est prouvé qu'un suicide chez un proche ou dans la famille augmentait le risque de suicide.
2) Incohérence dans les faits rapportés => A perdu 6 Kg en une semaine. Ce n'est pas possible.
3) Idées suicidaires clairement exprimées, de plus sur le même mode que sa mère.
Réponse B, C et D : Faux. Dans la mesure où il faut proposer une hospitalisation, ces propositions sont fausses à ce stade.
Si la patiente refuse ? Que faire, la salle d'attente est pleine, vous n'avez pas le temps de vous lancer dans une discussion longue.
Et bien ni l'un ni l'autre :
Il faut appeler un proche ! On sous estime l'aide des proches en psychiatrie et ce dans tous les domaines. Que ce soit pour évaluer sémiologiquement les patients, contrôler l'efficacité des traitements ou ici dans une situation d'urgence ! Un proche vous fera gagner du temps !
Imaginons que Mlle E. vous donne les coordonnées de son père, vous l'appelez :
Une sœur est présente lors de l’appel. Elle vous signale qu'elle se dégrade depuis 3 semaines en fait et pas 7 jours...
Le père et la soeur refusent toute idée d’hospitalisation en psychiatrie, lui est retraité, son autre fille en vacances. Ils pourront être au domicile de la patiente.
Et bien dans cette situation, c'est TRÈS SIMPLE : vous le notez dans le dossier et vous n'hospitalisez pas sous contrainte la patiente. Sur le plan médico légal vous serez protégé.
👉 Jamais de soin sous contrainte si l’entourage proche est contre (sauf si défaillance majeure)
Si vous n'avez pas de proche disponible pour accompagner la patiente : ne perdez pas de temps = appelez le SAMU. C'est le moyen le + efficace pour hospitaliser si patiente refuse et qu'il n'y a pas de proche disponible.
Les points clefs à connaître sont résumés dans cette courte video avec Dr Sikorav, psychiatre libéral en Mayenne :
Vous décidez d'introduire un traitement antidépresseur. Vous souhaitez avoir un effet pharmacologique anti dépresseur le plus pur possible sans induire de possibles effets secondaires et sans avoir des demi-vies brèves difficiles à gérer.
Quelle(s) molécule(s)s pourriez vous proposer ?
Les bonnes réponses sont C et D.
Réponse A : Faux. La fluoxétine et la paroxétine sont des inhibiteurs enzymatiques puissants, ils peuvent induire des modifications importantes d'effets thérapeutiques sur les autres traitements pris par vos patients.
De plus, la paroxétine a une action anticholinergique et de demi-vie brève. Cela la rend pourvoyeuse d'effets secondaires fréquents chez les personnes âgées par exemple. C'est la notion de charge cholinergique des médicaments. Voir la fiche de guideline.care sur ce sujet en cliquant ici Fiche "Charge anticholinergique".
Réponse B : Faux. La venlafaxine a un effet noradrénergique léger (dose dépendant) et une demi-vie brève.
Réponse C et D : Vrai.
1) Escitalopram est un IRS pur
2) Sertraline est un IRS pur également (un peu moins que l'escitalopram)
3) Mirtazapine est sédatif avec une reprise de l'appétit efficace. Elle marche un peu plus rapidement. Elle est intéressante si l'on veut agir sur une insomnie et une anorexie avec perte de poids tout en agissant aussi sur la dépressin.
Attention toutefois aux effets métaboliques ! La mirtazapine augmente les triglycérides, le cholestérol et la glycémie.
👉 Surveillance : bilan lipidique régulier, notamment chez les patients à risque cardiovasculaire.
👉 Surveillance : glycémie à jeun, HbA1c.
On résume l'essentiel à retenir sur la pharmaco des antidépresseurs en MG dans cette capsule video :
La patiente accepte de prendre de la sertraline, elle s’est renseignée et sa mère avait pris un poids considérable avec la mirtazapine.Elle préfère donc la sertraline.
Est-ce que vous prescrivez une molécule anxiolytique et un hypnotique adjuvants ?
Les bonnes réponses sont A et B.
Réponse A et B : Vrai. Prescrire un anxiolytique dans le début d'un traitement antidépresseur permet d’aller plus vite dans le contrôle des symptômes. Il faut le voir comme un "booster" ou un "adjuvant" au traitement antidépresseur.
Cependant, j'attire votre attention sur certaines idées reçues : il n'existe aucune donnée sur la diminution du risque de suicides avec un anxiolytique.
On sur estime parfois les risques liés à l'usage de ces traitements, en effet le risque de mésusage est faible et le risque de tolérance est très faible. De même le risque d’escalade thérapeutique est <2 %.
👉 Alprazolam unique en son genre, il est différent des autres benzodiazépines car il a une action sérotoninergique. Le lorazepam n’a pas de métabolite actif ce qui le rend très simple à utiliser !
Tout le reste des benzodiazépines se ressemble, hors la variabilité interindividuelle et celle de la littérature font qu’il n’y pas besoin de passer des heures sur ce problème. Cela ne sert à rien de se prendre la tête pour choisir une benzodiazépine en fait. Il faut reter sur ces 2 molécules Alprazolam ou Lorazepam.
Vous voyez, il y a des dizaines de molécules disponibles mais vous ne pouvez retenir que 3 antidépresseurs et 2 benzo !
Escitalopram / Sertraline / Mirtazapine
Alprazolam / Lorazepam
Réponse C : Vrai, accélère la réponse et nous sommes pressés d'avoir un effet thérapeutique dans ces situations. L'effet n'est pas forcément différent après 4 semaines en comparaison avec absence d'hypnotique.
Le risque d’addiction est encore une fois faible et souvent surestimé par la profession. Il sera toujours possible de l’arrêter si n’est pas nécessaire.
Retenir 2 hypnotiques dans votre pharmacopée : Z-drugs : zolpidem et zopiclone. Zolpidem en ordonnance sécurisée.
Zopiclone a un métabolite actif => le desméthylzopiclone qui a plusieurs propriétés qui le rendent très différent d’un « antidépresseur »
Mais attention lors de l’arrêt, je vous explique comment faire dans la courte video.
Le zolpidem n’a pas ce problème par contre, il faut penser à le prescrire en demi-dose chez la femme.
Réponse D : Faux.
Les Benzodiazépines :
Ce qu'il faut retenir a propos des hypnotiques, Dr Sikorav vous résume cela dans cette video :
La patiente revient vous voir au bout de 3 semaines. Aucune amélioration sur le plan thymique.
Le sommeil est correct, elle est moins anxieuse et dira avoir en réalité eu des idées suicidaires qui sont maintenant à distance.
Quelles sont les bonnes réponses parmi ces propositions ?
Les bonnes réponses sont A et D.
Réponse A : Vrai, épisode dépressif caractérisé = vous introduisez un antidépresseur. Il faut recontrôler le patient à J15, il doit y avoir une amélioration thymique. Pas une normalisation mais au moins une amélioration partielle.
Si rien ne bouge, il faut modifier le traitement dès J15 ! 👉 Trop souvent les traitements ne sont pas modifiés assez rapidement, le bon timing est J15 sur le plan thymique.
Si vous n'avez pas d'amélioration à J15 : on doit augmenter les doses. Il ne faut pas switcher à ce stade.
Exemple concret => Ordonnance de Mlle Etienne lorsque vous la revoyez à J15.
- Sertraline 25 mg/matin pendant un mois.
- Alprazolam 0.25 mg: 1 comprimé si besoin 3 fois par jour pendant un mois.
- Zopiclone 7,5 mg au coucher en systématique.
Voici la courbe du risque relatif (selon la dose de Sertraline) de :
Furukawa TA, Cipriani A, Cowen PJ, Leucht S, Egger M, Salanti G. Optimal dose of selective serotonin reuptake inhibitors, venlafaxine, and mirtazapine in major depression: a systematic review and dose-response meta-analysis. Lancet Psychiatry. 2019 Jul;6(7):601-609. doi: 10.1016/S2215-0366(19)30217-2. Epub 2019 Jun 6. PMID: 31178367; PMCID: PMC6586944.
Sur le graphe de gauche, on voit bien que la réponse maximale se situe à 75-100mg de Sertraline. On a débuté le traitement par 25mg, on peut donc tout de suite passer à 75mg voir 100mg de Sertraline si à J15 la réponse n'est pas suffisante.
Réponse B : Faux. Une amélioration partielle doit être un objectif atteint à J15 sur le plan thymique.
Réponse C : Faux. On ne switch pas en 1ère intention. On essaie d'aller à la posologie la plus efficace sur le plan pharmacologique cf commentaire de réponse A.
Réponse D : Vrai. Une absence d’amélioration du sommeil après 48 heures doit faire modifier le traitement hypnotique. Attention à ne pas confondre :
Vous revoyez la patiente 2 semaines plus tard : toujours aucune amélioration sur le plan thymique.
Elle n'a par contre plus d'idée suicidaire ni d'insomnie et l'anxiété est bien contrôlée.
Que faites-vous ?
La bonne réponse est A.
Il est un peu moins efficace de switcher vers un IRS que de switcher vers un IRSNa, mais ce qu'on gagne en efficacité (peu) on le perd beaucoup en tolérance !
L'anxiolytique et l'hypnotique ont permis de diminuer l'angoisse et l'insomnie de la patiente. Ils font le job qu'on leur demande. On aurait beaucoup à perdre de modifier anxiolytique et/ou hypnotique pour un avoir un effet thymique et finalement pas grand-chose à gagner.
10 mg d’escitalopram = 50 mg de sertraline
Switch qui dans ce sens se fait facilement !
Il peut se faire immédiatement ou en cross over :
J0 sertraline 75 mg escitalopram 0 mg
J5 sertraline 25 mg escitalopram 10 mg
J10 sertraline 0 mg escitalopram 20 mg
Voici un tableau à garder dans ses notes :
Dr Sikorav vous résume l'essentiel à savoir dans cette courte capsule video :
Au bout de combien de semaines sans amélioration pouvez vous considérer que les 20 mg d’escitalopram sont inefficaces ?
Les bonnes réponses sont C et D.
Nous sommes sur la seconde molécule sérotoninergique : les délais sont plus longs.
1ère molécule : délai d'obtention d'amélioration clinique 15j
2ème molécule : délai d'obtention d'amélioration clinique 1 mois.
Comment mesurer l'amélioration thymique de vos patients au cabinet ?
1) Méthode longue : faire un score pré traitement. Ex : PHQ-9 ou Hamilton puis refaire le score en post traitement et comparer.
2) Méthode courte ... et aussi efficace 😃 : "De 0 à 10, quel est le pourcentage d'amélioration que vous estimez depuis la prise du traitement ?" Si le patient répond 2 cela correspond à une amélioration partielle suffisante.
Vous revoyez la patiente 4 semaines après le switch : elle se dit améliorée à 40%.
Elle n'a plus d’idées suicidaire ni plus de problématique anxieuse, vous avez pris soin de demander au père de venir, il partage ce constat partagé.
Vous décidez de laisser le traitement en place, oui mais pour combien de temps ?
La bonne réponse est A.
Au bout de 6 mois, le risque de rechute est au plus bas, avec ou sans traitement. Il est donc licite de stopper le traitement anti dépresseur.
A 6 mois 👉 garder l’IRS n’ajoute rien par rapport à l’arrêter, en moyenne.
Attention, l’alprazolam et le zopiclone on peut-être participé à l’amélioration au delà de leurs propriétés anxiolytiques et hypnotiques...
A 6 mois, règle des 3 :
Et si la patiente n'avait pas répondu à l’escitalopram, c'est à dire au 2ème antidépresseur.
Quelle aurait été l’intervention pharmacologique la plus pertinente pour la suite ?
Toutes les réponses sont bonnes !
En fait, cette question est double. En effet, sii la patiente ne répond pas au 2ème ATD, il faudra alors se demander quelque chose de
CA PI TAL !
Est-ce bien une dépression ? ou est-ce une maladie maniaco dépressive (trouble bipolaire) ?
Cette question est CAPITALE, en effet, les antidépresseurs chez les bipolaires peuvent les améliorer transitoirement au début et peuvent les dégrader parfois des mois après de façon brutale ou de façon insidieuse.
Idée reçue : on craint les virages maniaques sous antidépresseurs mais ils ne sont pas si fréquents !
Petit rappel :
La maladie maniaco dépressive peut se présenter sous forme de dépressions récurrentes => les phases maniaques ne sont pas nécessairement présentes !
Pronostic, réponse au traitement et précautions sont les mêmes qu’avec les patients bipolaires ayant des phases maniaques.
Revenons au cas de Mlle Etienne... Avait-elle d'emblée des éléments cliniques pouvant nous orienter vers une maladie maniaco dépressive ?
La HAS a publié des indicateurs :
Chez Mlle Etienne, il y a donc :
Revenons aux traitements possibles an cas d'échec de 2 antidépresseurs.
L'aripiprazole a plusieurs RCT positives dans la dépression unipolaire, y compris quand il y a une « résistance ». Les problématiques habituelles sont métaboliques, et neurologiques avec les effets secondaires.
Le lithium est efficace dans la dépression bipolaire et unipolaire, c'est probablement une affaire de spécialiste psychiatre pour l'introduire. Il est probablement moins dangereux que d’autres molécules couramment prescrites !
La lamotrigine a une tolérance similaire au placebo en psychiatrie, le risque d’éruption cutanée maligne est de 1/4000. Elle est en moyenne neutre sur le poids.
La quétiapine a des effets secondaires similaires à ceux du Tercian (cyamémazine) mais les données sur les troubles anxieux et la dépression n’ont rien à voir, il n'y a presque aucune raison d’introduire du Tercian en 2025 ! Il faut lui préférer la Quétiapine.
Voici une dernière video, un peu longue mais super instructive (on l'espère) pour clore ce cas clinique :
Les 10 points clefs à retenir :
1) Face à une dépression sévère, toujours proposer une hospitalisation ! Si refus, appelez un proche. Si le proche refuse , notez dans votre dossier médical : vous aurez limité le risque médico-légal.
2) Les proches sont très utiles pour répondre aux cas d'urgence, affiner le diagnostic et contrôler l'efficacité d'un traitement. Demandez aux proches de venir aux consultations.
3) Utilisez 3 antidépresseurs : escitalopram, sertraline ou mirtazapine
4) Mirtazaprine : 2 en 1 (effet thymique et hypnotique)
5) Utilisez 2 anxiolytiques : Lorazepam en 1ère intention ou Alprazolam
6) Alprazolam : effet antidépresseur sérotoninergique => piège de rechute thymique lors de son arrêt
7) Utilisez 2 hypnotiques : Zolpidem ou zopiclone. Attention : zopiclone a un effet antidépresseur => piège de rechute thymique lors de son arrêt. Zolpidem sous ordonnance sécurisée.
8) Evaluation de l'efficacité hypnotique : 48h et de l'efficacité thymique : 15j au 1er antidépresseur puis 4 à 6 semaines au 2ème antidépresseur.
9) Si pas d'amélioration thymique à J15 : soit au moins 20% d'amélioration ressentie sur une échelle de 0 à 10 => Augmenter les doses puis si toujours rien 15 j après switcher pour un autre IRS. Ex Sertraline puis Escitalopram.
10) Une absence d'amélioration d'un état dépressif avec 2 antidépresseurs est une maladie maniaco dépressive jusqu'à preuve d'u contraire. Ayez toujours en arrière pensée un trouble bipolaire (possible sans phase maniaque) chez un dépressif chronique... ! Demandez avis au psychiatre dans ce cas les antidépresseurs ne fonctionnent pas. 30% des épisodes dépressifs s'intègrent dans un trouble bipolaire !