Spécificités du risque cardiovasculaire chez la femme en médecine générale
Pour accéder au contenu, inscrivez-vous, c'est gratuit !

Si vous êtes déjà inscrit, tapez juste votre adresse email puis votre mot de passe

En vous inscrivant, vous acceptez nos conditions d'utilisation.

Épisode 3 : Spécificités de l’HTA, du diabète et de l’hypercholestérolémie chez la femme



La phrase du jour :

 

« Il n’y a pas de différence d’effet des anti-hypertenseurs selon le sexe. »


I) Spécificités de l'HTA chez la femme :

 

1-1) Recommandations de la Société Française d'HTA

Jusqu’à 50 - 60 ans, l’hypertension artérielle est une maladie peu fréquente, moins fréquente chez les femmes que chez les hommes.

A partir de la ménopause, la prévalence d'hypertension artérielle chez la femme augmente et rejoint rapidement celui de l’homme pour même le dépasser à partir de la septième décennie. L’analyse de la littérature ne permet pas de déterminer si cette différence est liée à un effet protecteur des estrogènes endogènes sur le risque d’hypertension artérielle.

Il n’a par contre pas été clairement démontré qu’un traitement hormonal de la ménopause réduisait le niveau de pression artérielle. 

Il est recommandé d’évaluer :

  1. le risque cardio-vasculaire : tabac, indice de masse corporelle, la circonférence abdominale, diabète, glycémie à jeun, dyslipidémie, d’antécédents cardio-vasculaires familiaux précoces, altération de la fonction rénale, la détection d’une protéinurie avec l’étude du ratio urinaire albumine/créatinine
  2. de rechercher des antécédents personnels de migraines avec aura étant donné l’augmentation associée du risque d’AVC
  3. les antécédents d’HTA gravidique, pré- éclampsie, HELLP, RCIU, ou de diabète gestationnel 
  4. de dépister un syndrome d’apnée du sommeil devant des signes cliniques évocateurs à l’interrogatoire. 

Pour en savoir plus sur le SAOS en médecine générale 👉🏻 rendez-vous sur notre formation d'une heure par Pr Vespignani neurologue, spécialisé dans les troubles du sommeil et le SAOS en cliquant ici :

 

1-2) Spécificité du traitement non médicamenteux de l’HTA chez la femme

Les actions à mener sont les suivantes : 

  • un sevrage tabagique 
  • une alimentation, pauvre en sel avec un objectif à 6 g/jour de sel, riche en fibres, en légumes et acides gras polyinsaturés 
  • une limitation de la consommation d’alcool qui ne doit pas dépasser 1 unité/jour avec moins de 8 unités par semaine
  • une pratique régulière d’activité physique correspondant à 150 min/semaine à intensité modérée (respiration compatible avec une conversation) ou 75 min/ semaine à intensité élevée (respiration incompatible avec une conversation)
  • maintenir ou atteindre un IMC < 25 kg/m2 
  • rechercher et de prendre en compte les freins à la mise en œuvre des mesures d’amélioration de l’hygiène de vie (statut socio-économique défavorisé, l’isolement, le stress au travail et la dépression) 
1-3) HTA et grossesse

  • CI des IEC, ARA2 et des inhibiteurs directs de la rénine en cas de désir de grossesse ou de grossesse débutante. Il est recommandé d’indiquer dans le dossier médical et dans le courrier cette information délivrée à la patiente. 
  • La prise de spironolactone expose à un risque théorique de féminisation d’un fœtus masculin, 
  • consultation pré-conceptionnelle suggérée chez la femme hypertendue traitée ayant un désir de grossesse pour adapter les traitements antihypertenseurs et vérifer le contrôle de la pression artérielle

 

1-4)Traitement de l'HTA chez la femme

Il n’y a pas de différence d’effet des antihypertenseurs selon le sexe. 

a) Il est suggéré d’envisager, en première intention, la prescription de diurétiques thiazidiques chez les patientes ménopausées à haut risque de fracture ostéoporotique, ou une corticothérapie systémique en cours. 

b) Il est suggéré d’envisager, en première intention, la prescription d’un bétabloquant notamment le métoprolol ou le propranolol, chez les patientes hypertendues migraineuses. 

c) Il est suggéré d’envisager, en première intention, la spironolactone chez la patiente hypertendue ayant un syndrome des ovaires polykystiques, afin de limiter certains symptômes tels que l’hirsutisme, du fait de son action sur les récepteurs androgèniques.

d)  Il est suggéré d’envisager une alternative thérapeutique à la spironolactone chez les femmes qui souffrent de mastodynies ou de métrorragies.  

e)  Il n’y a pas d’argument à ce jour en faveur de l’augmentation du risque de cancer gynécologique chez les femmes traitées par la spironolactone. Toutefois, chez les femmes ayant eu un cancer du sein ou de l’endomètre, il est suggéré, par principe de précaution, de substituer la spironolactone par un autre anti-hypertenseur en l’absence d’indication spécifique.  

1-5) HTA secondaires chez la femme

Les deux principales étiologies non iatrogènes d’une HTA secondaire chez la femme en âge de procréer sont :

  1. l’hyperaldostéronisme primaire et
  2. la dysplasie fibromusculaire rénale. 

Il est recommandé de rechercher une HTA secondaire chez les femmes qui restent hypertendues trois mois après une grossesse, chez les patientes de moins de 40 ans ou chez les patientes ayant une HTA de grade 3 (PA ≥ 180/110 mm Hg) 

La principale étiologie iatrogène d’une HTA secondaire chez la femme en âge de procréer est la contraception estroprogestative 👉🏻 confirmer le diagnostic d’HTA au moins 3 mois après l’arrêt de la contraception estroprogestative.

1-6) HTA et ménopause

Chez la femme hypertendue et ménopausée, il est conseillé de : 

Renseigner l’ancienneté de la ménopause (< à 10 ans); prendre en compte la précocité de la survenue de celle-ci (< 40 ans) et l’existence ou non de symptômes climatériques.

Il est recommandé de rechercher les symptômes suspects de maladie coronaire de la femme et de dépister l’artériopathie des membres inférieurs. Une vigilance particulière sera portée aux femmes fumeuses et/ou diabétiques. 

Chez une femme hypertendue ménopausée n’ayant pas de symptômes climatériques, il n’est pas recommandé d’initier un Traitement Hormonal de la Ménopause (THM). 

Il n’est pas recommandé de prescrire un THM (voie orale ou transdermique) chez une femme hypertendue à risque cardio-vasculaire élevé ou très élevé, quel que soit son âge et l’ancienneté de sa ménopause. 

Il n’est pas recommandé de prescrire un THM (par voie orale ou transdermique) chez une femme hypertendue de plus de 60 ans et dont la ménopause date de plus de 10 ans, quel que soit son niveau de risque cardio-vasculaire. 

Il est recommandé de prescrire uniquement des estrogènes par voie transdermique (voie orale contre indiquée) associés à de la progestérone naturelle ou de la dydrogestérone en l’absence d’hystérectomie, chez une femme hypertendue contrôlée, à risque cardio-vasculaire faible à modéré, âgée de moins de 60 ans, et dont la ménopause date de moins de 10 ans.

 

Catégorie
de risque à 10 ans 

Critères 

Risque CV 

élevé à très élevé 

(au moins un des éléments suivants) 

Maladie coronaire ou cérébro-vasculaire
Artériopathie oblitérante des membres inférieurs ; artériopathie des artères rénales ou des artères digestives ; anévrysme de l’aorte abdominale 

Fibrillation atriale 

Plaque d’athérome significative documentée (sténose ≥ 50 %) 

 Insufissance rénale modérée (CKD-eDFG : 30-50 mL/min/1.73m2) ou sévère (CKD-eDFG < 30 mL/min/1,73m2) ; et/ou ratio albumine/créatinine urinaire > 30 mg/g 

Diabète, avec ou sans atteinte d’organe cible
Hypercholestérolémie sévère familiale (> 310 mg/dl)

 HTA de grade 3 (PA ≥ 180/110 mn Hg) ou avec hypertrophie ventriculaire gauche 

Risque cardio-vasculaire selon le SCORE ≥ 5 % 

Risque CV 

à préciser par un 

avis cardio-vasculaire 

(au moins un des éléments suivants) 

Facteurs de risque majeurs 

  • Tabagisme actif ou arrêt < 3 ans* +++ 
  • HTA grade 1 ou 2 non traitée, ou traitée et non contrôlée 
  • Dyslipidémie traitée ou non traitée 
  • Antécédent familial de maladie cardio- vasculaire au 1er degré < 55 ans chez l’homme et < 65 ans chez la femme 
  • Antécédent familial d’AVC au 1er degré < 45 ans 
  • Obésité abdominale
    (circonférence abdominale ≥ 88 cm) 

Autres facteurs ou situations à risque dont certains spécifiques
chez la femme** 

Antécédents d’HTA de la grossesse
(HTA gravidique, pré-éclampsie, Hellp syndrome) et/ou de diabète gestationnel** 

  • Migraine avec aura** 
  • Ménopause (surtout si < 40 ans)** 
  • Syndrome métabolique 
  • Athérosclérose infra-clinique
    (plaque d’athérome) de découverte fortuite non significative < 50 %) 
  • Maladie systémique auto-immune 
  • Maladie inflammatoire chronique 
  • Sédentarité 
  • Désadaptation cardio-vasculaire à l’effort 

Risque CV faible à modéré 

 HTA grade 1 ou grade 2 traitée et contrôlée, sans autre facteur de risque cardio-vasculaire  Risque cardio-vasculaire selon le SCORE < 5 % 

*Le tabagisme est le 1er facteur de risque majeur d’accident coronaire chez la femme de moins de 55 ans La femme est en situation optimale de santé CV si elle n’a aucun facteur ou situation à risque et une hygiène de vie parfaite. 

                                                      Stratification spécifique du risque cardio-vasculaire artériel chez la femme 

Pour aller plus loin 👇

Mosca L. et al. Recommandations AHA sur le risque cardio-vasculaire de femme; Buschnell et al. Recommandations AHA sur l’AVC de la femme. Stratification du risque cardio-vasculaire HAS 2017 ; Stratification du risque cardio-vasculaire de l’hypertendu ESH/ESC 2018 ;
Recommandation sur la prévention cardio-vasculaire ESC 2016 ; Recommandations de la Société Endocrinienne sur la ménopause 2015 

 

II) Spécificité du diabète chez les femmes

Alors que chez les hommes atteints de diabète, le risque de développer une maladie cardiaque est deux à trois fois plus élevé, chez les femmes diabétiques, il l’est six fois plus. 

Le diagnostic de diabète peut être fait par la mesure de la glycémie à jeun ( 7,0 mmol/L ou 1,26 g/l), de la glycémie 2 heures après charge en glucose ( 11,1 mmol/L ou 2g/l) ou le dosage de l’HbA1c ( 6,5 %). 

Un taux d’HbA1c < 6,5 % n’exclut pas le diagnostic de diabète, qui doit être recherché par une hyperglycémie provoquée orale chez les patients à haut risque de métabolisme glucidique perturbé. 

Pour mémoire les signes de diabète classique sont : miction, soif (= Sd polyuro polydypsique), asthénie et perte de poids

Il existe des spécificités du diabète chez la femme :

1- Des affections urogénitales peuvent annoncer un diabète :

Les infections urinaires à répétition : le diabète provoque l'excrétion d'une plus grande quantité de glucose dans l'urine, ce qui entraîne une augmentation des infections urinaires. 

La sécheresse vaginale est aussi un signe possible devant faire alerter sur un possible diabète sous jacent.

2- Syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) non traité, précurseur d'un diabète :

Ce trouble hormonal survient lorsqu'une femme produit un excès d'androgènes. Non traités, les ovaires polykystiques peuvent entraîner un certain nombre de complications, y compris le diabète. 

3- Les antécédents de diabète gestationnel augmentent les risques

Contrôle de la glycémie quatre à douze semaines après l’accouchement puis tous les un à trois ans.

Le cycle menstruel complique la gestion de la glycémie. Les changements hormonaux avant et pendant les règles peuvent compliquer la prédiction de la glycémie.

4- Des relations sexuelles perturbées   

Problèmes de lubrification par atteinte des artères et des nerfs autour du vagin et au niveau du clitoris. 

5- Des risques de complications pendant la grossesse 

  • planifier la grossesse
  • Augmentation des risques de pré éclampsie, d’accouchement par césarienne, de fausse couche, de prématurité, de malformations congénitales.

6- Des risques de complications pendant la ménopause

La ménopause induisant une baisse des oestrogènes, la glycémie des femmes diabétiques peut alors fluctuer de manière imprévisible.

Comment agir sur la glycémie ?

Consommation quotidienne de fruits et de légumes. 

Augmentation de la consommation de fibres alimentaires. 

Consommation modérée de carbohydrates simples. 

Réduction de la consommation totale de graisses alimentaires. 

Remplacement des graisses saturées par des graisses mono ou polyinsaturées. 

Activité physique 30 min/j ou 150 min/semaine. 

Réduction du poids 5 % si l’IMC est 25 kg/m2. 

Consommation d’alcool modérée. 

TA < 135/85 mmHg.

Cholestérol des LDL < 1,8 mmol/L (< 0,7 g/L).

HbA1c < 7 %. 

 

III) Spécificité du cholestérol chez la femme

Jusqu'à la ménopause, les femmes présentent un profil lipidique beaucoup plus favorable que les hommes avec :

A la ménopause :

  • le taux de cholestérol total et le LDL-cholestérol augmentent
  • la concentration des triglycérides s'élève 

Le niveau de cholestérol moyen, qui était inférieur à celui relevé chez les hommes avant 50 ans, va le dépasser après 55 ans. 

Ils contribuent à majorer la survenue de maladies cardiovasculaires.

Dosages :

  • cholestérol total, HDL, LDL, TG
  • Non HDL cholestérol (Cholestérol non HDL-C = cholestérol total – HDL-C)
  • parfois l’apoB et la lipoproteine (a)

La Société européenne de cardiologie (ESC) persiste dans l’utilisation de sa formule de risque basée sur l’âge, le sexe, le cholestérol total, le tabagisme et la pression artérielle systolique = Equation SCORE

Les quatre grandes catégories de risque sont redéfinies et une sous-catégorie est introduite :

  • les sujets à bas risque,
  • les sujets à risque modéré,
  • les sujets à risque élevé,
  • les sujets à risque très élevé,
  • les sujets à très haut risque avec une maladie cardiovasculaire agressive : les patients ayant présenté une rechute cardiovasculaire dans les 2 ans alors qu’ils étaient sous traitement par statines à la dose maximale.

Recommandations européennes (ESC2019) :

ldl-cholesterol-dpc-medecine

objectif-ldl-cholesterol

 

Comment agir sur le Cholestérol ?
  • L’arrêt du tabac.
  • Une alimentation saine et équilibrée comportant notamment des légumes, des fruits, du poisson, et des céréales complètes.
  • L’activité physique soutenue doit être pratiquée pendant 3,5 à 7 heures par semaine ou pendant 30 à 60 minutes tous les jours.
  • L’indice de masse corporelle doit être entre 20 et 25 kg/m2 de surface corporelle.
  • Le tour de taille doit être inférieur à 80 cm chez la femme.
  • TA à 140 mm de mercure pour la systolique et 90 mm de mercure pour la diastolique. 
  • Les triglycérides doivent être inférieurs à 1,50 g/l ; si les triglycérides dépassent 2 g/l, un traitement médicamenteux doit être envisagé chez le sujet à haut risque (classe I). 
  • L’hémoglobine gly. doit être < 7 %.
Traitement 

Si l’objectif de LDL-cholestérol n’est pas atteint avec une statine seule, une association avec un inhibiteur de l’absorption du cholestérol est recommandée (Ezétimide)

La dose de statine doit être réévaluée en fonction de son efficacité et de ses effets secondaires (crampes, CPK, ASAT, ALAT)

Pour les patientes à très haut risque, alors qu’ils sont à une dose maximale tolérée de statines et sous un inhibiteur de l’absorption du cholestérol, l’association thérapeutique avec des anticorps monoclonaux anti-PSCK9 est recommandée. 

Installez-vous confortablement ☕️ ☕️ ☕️
Attaquons maintenant la 2ème partie de cet épisode en cliquant sur la vidéo du Dr Anne Tisserant, cardiologue qui vous résume les éléments clefs à retenir 😉
Rendez-vous après la vidéo pour les QCM ! Bonne projection 🎥 😉
- Pas le temps pour la vidéo ?
- C’est pas grave, faites une pause, vous pourrez reprendre plus tard nous mesurons le temps de formation, chacun son rythme !