Démarche diagnostique en proctologie en médecine générale
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Épisode 2 : La maladie hémorroïdaire en MG



"Focus sur les hémorroïdes"

Nous allons voir dans cet épisode ce qu'il faut retenir sur la pathologie hémorroïdaire en MG.

Tout d'abord, il faut savoir que les hémorroïdes sont des structures vasculaires anatomiques normalement présentes chez tous, elles deviennent pathologiques uniquement lorsque des symptômes apparaissent !

"Dr, j'ai des hémorroïdes" est donc parfois une affirmation doublement fausse, en effet d'une part le fait d'avoir des hémorroïdes n'est pas pathologique (tout le monde en a) et d'autre part cet auto-diagnostic porté par le malade est souvent erroné comme vous l'avez vu à l'épisode 1 ! 

Retenons donc bien que les patients ont tendance à prendre toute douleur anale pour des hémorroïdes ce qui constitue un grand piège diagnostique ! 

I) Rappels Physiologiques et physiopathologiques

Les hémorroïdes sont donc des formations vasculaires physiologiques de l’anus. 

Elles assurent la régulation de la CONTINENCE ANALE FINE en exerçant une partie de la pression de continence au repos.

On distinguera :

  1. les hémorroïdes externes situées en dessous de la ligne pectinée
  2. et les hémorroïdes internes situées dans la partie haute du canal anal au dessus de cette ligne pectinée.

hemorroide-anatomie

II) Epidémiologie

Quelques chiffres pour illustrer la fréquence de la pathologie hémorroïdaire : 

👉🏻 1 personne sur 3 a consulté pour une pathologie hémorroïdaire 

👉🏻 1 personne sur 3 s'auto-médique 🧨🧨🧨

👉🏻 3 grandes situations sont à risque :

  1. T3 grossesse,
  2. Post partum et
  3. La constipation chronique 

 

III) Les hémorroïdes externes 

La seule complication des hémorroïdes externes est la THROMBOSE HEMORROIDAIRE.

III-1 Diagnostic de la crise hémorroïdaire ou thrombose hémorroïdaire

Le diagnostic se fait en 2 temps

  1. INTERROGATOIRE : douleur anale aiguë non rythmée par la défécation.
  2. Examen PROCTOLOGIQUE : tuméfaction bleutée ou noirâtre (selon la couleur du caillot sanguin bloqué...)👇

thrombose

Thrombose hémorroïdaire bleutée ou noire => incision simple soulage la douleur IMMEDIATEMENT et DEFINITIVE

2 éléments clefs à connaître pour les thromboses hémorroïdaires : 

  1. Ne pas confondre une thrombose hémorroïdaire externe à l'interrogatoire avec une fissure (fissure = douleur rythmée par la défécation) ou à l'examen proctologique avec un abcès péri anal (tuméfaction insomniante) 
  2. Ne surtout pas inciser une thrombose hémorroïdaire inflammatoire !! (dans le doute adresser au proctologue si dispo facilement)

thrombose-inflammatoire

Thrombose inflammatoire = pas d'aspect bleuté ou noir ! => aucun caillot n'est visualisé => ne pas inciser +++ (car augmente l'intensité et la durée de la douleur)

 

 abces-anal

            Abcès anal : un abcès anal est toujours une urgence chirurgicale 🚨

👉🏻 Ne pas attendre que l’abcès « murisse », ne pas laisser repartir un malade sous antibiotiques non drainé 🧨

👉🏻 Le risque est l’évolution vers la gangrène (surtout sujet âgé, diabète…) 🧨

 

III-2) Comment évolue une thrombose hémorroïdaire ?

La période douloureuse est en général limitée aux 2 à 5 premiers jours de la poussée.

La boule quant à elle met 1 à 6 semaines à disparaitre.

Une érosion de surface peut faire apparaitre secondairement un suintement et/ou un saignement.

Il n’y a aucun risque de complication telle que la migration d’un caillot, une infection ou une cancérisation.

A plus long terme une thrombose peut rester un accident isolé sans lendemain. C’est le plus souvent le cas des crises de la grossesse ou de l’accouchement. Chez d’autres cet accident peut se répéter à un rythme plus ou moins soutenu.

3 évolutions spontanées d'une thrombose hémorroïdaire externe sont possibles : 

  1. Guérison avec restitution anatomique ad integrum 
  2. Ouverture à la peau libérant le caillot (rectorragie)
  3. Marisque 

La marisque est un petit lambeau de peau non douloureux témoignant donc de la cicatrisation d'une thrombose hémorroïdaire externe. Son traitement est uniquement esthétique si le patient est gêné.

marisque

                     Marisques anales 

Quelque fois source de confusion avec un condylome pourtant d'aspect fort différent 👇 

condylome-marisque

 

III-3) Le traitement de la thrombose hémorroïdaire

La thrombose hémorroïdaire est une URGENCE ANTALGIQUE, si vous êtes sûr et habitué du diagnostic le mieux est de l'inciser au cabinet, cela calmera immédiatement votre patient ! En cas de doute, procédez au traitement suivant : 

traitement-thrombose

En conclusion : la  « crise d’hémorroïdes » avec douleurs et tuméfaction correspond à une thrombose, et le traitement de base est représenté par les anti-inflammatoires (Kétoprofène par exemple). L’incision sous anesthésie locale doit être réservée aux thromboses très douloureuses avec un caillot bien visible et sans œdème.

 

IV) Un mot sur les veinotoniques...

Ces produits sont très utilisés en France et nous consommons l’essentiel de la production mondiale (40 millions de boites en 2002). Ils ont été déremboursés vers 2002 en raison d’un SMR (service médical rendu) insuffisant. Cela n’empêche pas leur utilisation de se poursuivre, avec des prix libres souvent élevés.

Pour l’anecdote, ces veinotoniques existaient il y a quelques décennies, avec des comprimés dosés à 125 mg avec un schéma thérapeutique à forte dose de 6 comprimés par jour pour soulager la crise hémorroïdaire. Des comprimés dosés à 500 mg ont donc été proposés, pour diminuer le nombre de prises par jour, mais très vite un protocole de traitement de la crise par forte dose a été recommandé, avec 6 cp à 500 mg.

On voit apparaître maintenant des comprimés dosés à 1g... Raisonnablement, les veinotoniques ont une petite efficacité sur la pathologie veineuse, et celle-ci est obtenue à la dose de 1 ou 2 comprimés par jour d’une diosmine dosée à 500 mg par exemple.

La prise de fortes doses, même sur quelques jours, n’a aucun intérêt et augmente les effets indésirables comme des épigastralgies. De plus, le coût est important pour les patients puisqu’ils ne sont pas remboursés...

V) Et les hémorroïdes internes (HI) ?

Les hémorroïdes internes ne peuvent pas être identifiées par un simple toucher : pendant la consultation, il faut introduire dans l’anus, un appareil non traumatisant (anuscope) pour les examiner. Réaliser une anuscopie est un examen bien spécifique dont on a parlé dans l'épisode 1 notamment pour savoir comment créer une atmosphère propice à la bonne compliance du patient. La pluspart du temps, en MG, l'examen proctologique se limite à déplisser la peau de la marge anale et à effectuer un TR. Il est évident que les hémorroïdes internes ne sont pas visualisées par la simple inspection de la marge anale sauf quand ils sont procidents de manière permanente ou lors de poussée. 

On a une classification à ce sujet à appliquer concernant les hémorroïdes internes : 

classification-hi

 

hi-stades

 

hi-semiologie

C'est à partir de cette classification que l'on définira la stratégie thérapeutique la plus adaptée. 

V-1) Quel est le traitement des hémorroïdes internes ?

La 1ère chose à savoir est que l'hémorroïde interne ne se traite que s'il existe une gêne ou une symptomatologie +++

Le traitement est graduel en fonction du stade des hémorroïdes internes d'où l'importance de connaître la classification donnée ci-dessus. Dans tous les cas, il faudra lutter contre les troubles du transit par les règles hygièno-diététiques. 

ttt-hi

L’hémorroïdectomie classique par la technique de Milligan et Morgan reste la technique de référence, avec un risque de récidive très faible, mais cela reste une opération lourde, douloureuse avec un arrêt de travail long (1 mois en général) et parfois des troubles résiduels sphinctériens => incontinence anale +++

C’est pourquoi, la tendance actuelle est de repousser autant que possible le recours à la chirurgie, en utilisant au maximum les possibilités des traitements instrumen- taux, et en développant des techniques chirurgicales moins agressives, même si elles sont moins définitives (ligature guidée par doppler = DGHAL, ablation laser, tech- nique de Longo = lifting des hémorroïdes internes prolabées).

V-2) Complication principale des hémorroïdes internes 

Il s'agit de l'anémie ferriprive par saignement +++ Avant toute chose, retenons bien que tout saignement après 50 ans (40-45 ans pour certains) et même avec des hémorroïdes connues, visualisées etc ... devra faire l'objet d'une coloscopie afin de ne pas méconnaître un cancer du colon.

Face à une anémie ferriprive même dans un contexte connu d'hémorroïdes, là aussi il faudra réaliser un bilan étiologique complet de cette anémie et ce n'est qu'en cas de bilan étiologique complet négatif et de compatibilité du saignement avec les hémorroïdes qu'on pourra retenir ce diagnostic ! 

Voilà la partie texte de cet épisode 2 est terminée.

Installez-vous confortablement ☕️ ☕️ ☕️  et visionnez la vidéo du Dr Vincent Pilloy, chirurgien digestif à Nancy, qui vous explique tout cela en détail.
Bonne projection 😉

Rendez-vous après la vidéo pour les QCM !

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C’est pas grave, faites une pause, vous pourrez reprendre plus tard nous mesurons le temps de formation, chacun son rythme !