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Au terme de ce cas clinique, vous aurez revu :
Comment trouver les repères anatomiques utiles pour orienter votre diagnostic clinique face à une douleur de la main et du poignet ?
Comment différentier 2 pathologies souvent confondues au poignet : la ténosynovite de De Quervain versus la rhizarthrose ?
Comment différentier 2 pathologies souvent confondues aux doigts : le mallet finger versus le jersey finger ?
Quelles sont les manoeuvres cliniques utiles (avec video de démonstration) dans la démarche diagnostique face à une douleur de la main et/ou du poignet (Finkelstein, Tinel, Phanel, Watson...) ?
Mme Q. 52 ans, nourrice à domicile consulte avec son mari ce matin car elle ressent depuis 2 mois environ une douleur à la main droite.
Cette simple gène au départ devient de plus en plus douloureuse maintenant.
" Docteur, une ancienne collègue coiffeuse (MmeQ. était coiffeuse avant de devenir nourrice) , s'est faite opérée récemment du canal carpien, j'espère que c'est pas cela sinon je vais devoir me mettre en arrêt pour la garde à domicile".
Mme Q. est inquiète car depuis quelques jours, elle constate une perte de force de cette main droite qui la gène notamment pour faire ses bigoudis quand elle tourne son peigne.
Pour mémoire, Mme Q. est mariée a 4 enfants et ne présente pas d'antécédent rhumatologique particulier. Elle est ménopausée depuis peu, ne fume pas. Elle semble mener une vie familiale agréable et part souvent en randonnée avec son mari et ses grands enfants.
Elle est droitière.
Vous examinez donc la main de la patiente pour repérer plus précisément de quelle région anatomique provient la douleur. La patiente ressent une douleur exquise lors que vous appuyez ici :
Selon le terrain et la localisation de la douleur, quel diagnostic clinique évoquez-vous ?
La bonne réponse est C !
Réponse A : La zone douloureuse de la rhizarthrose est plus distale sur la colonne du pouce :
Réponse B : Le syndrome du canal carpien donne effectivement une perte de force comme décrit la patiente : "depuis quelques jours en plus elle constate une perte de force de cette main droite" . Mais les douleurs touchent les 3 premiers doigts et sont associées à des paresthésies du nerf médian et sont classiquement insomniantes 👉
Réponse C : Il s'agit en effet d'une ténosynovite de De Quervain. La douleur survient sur le processus styloïde du radius et contrairement à la rhizarthrose où les douleurs irradient distalement dans le V ème doigt, là les douleurs diffusent dans l'avant bras proximalement le long des deux tendons formant le 1er compartiment des extenseurs 👉
Je vous explique en video comment différentier ténosynovite (ou tendinite) de De Quervain et rhizarthrose :
Réponse D : le syndrome du croisement est, comme la ténosynovite de De Quervain, une tendinite des extenseurs mais des 2ème et 3ème compartiments des extenseurs :
Il touche le 3ème tendon du pouce aussi : le long extenseur du pouce (EPL sur le dessin ci-dessus).
Retenons donc le pouce = 3 tendons à la face dorsale :
Je vous explique en vidéo comment faire le diagnostic clinique du syndrome du croisement :
En aparté :
Le mot "bigoudi" vient probablement du breton "bigoudenn" qui désigne une coiffe traditionnelle portée en Bretagne. Les bigoudens étaient un groupe de Bretons vivant dans la région de Pont-l'Abbé en Bretagne, connus pour porter cette coiffe.
Vous souhaitez conforter votre impression clinique de ténosynovite de De Quervain mais vous hésitez avec un syndrome du croisement.
Quel examen complémentaire demandez-vous en débrouilllage de 1ère intention ?
La bonne réponse est C.
L'échographie est l'examen complémentaire de choix en cas de doute. Le diagnostic de la tendinite de De Quervain reste clinique et repose sur le diptique localisation de la douleur + test de Finkelstein (vu dans la video du QCM 1).
L'échographie est rapide à obtenir (en tout cas plus rapide que l'IRM), cet examen est finalement à cheval entre la clinique et les examens complémentaires, en effet de plus en plus de médecins généralistes sont équipés d'échographes qui devient le "stéthoscope du XXIème siècle" => #POCUS (Point Of Care Ultra Sound).
La radiographie servirait plus à éliminer d'autres pathologies associées au poignet comme la rhizarthrose par exemple.
L'IRM est l'imagerie de choix pour rechercher d'autres pathologie tendineuses associées mais jamais en 1ère intention comme ici. Les délais seraient trop longs avant de pouvoir entamer un traitement chez cette patiente.
Le scanner n'a aucun intérêt.
Quel(s) traitement(s) proposez-vous à la patiente ?
Les bonnes réponses sont A, B et C.
On peut synthétiser le traitement de la manière suivante.
1ère intention :
J'ai mis une ordonnance type dans la fiche sur la tendinite de De Quervain. L'équipe de Guideline.care me fait vous préciser qu'il y a plus de 150 ordonnances types avec plus de 200 recommandations disponibles sur le site pour les abonnés et/ou souscripteurs aux formations DPC 😁
2ème intention :
L'infiltration de corticoïdes dans la gaine des extenseurs du 1er compartiment est le traitement de choix en 2ème ligne. Il doit être proposé après 3 semaines si échec des 1ères mesures.
L'infiltration + attelle est plus efficace qu'attelle seule. L'infiltration peut être réalisée sous contrôle échographique. Il s'agit d'un autre intérêt d'avoir un échographe en médecine générale, vous pouvez faire le test de Finkelstein, confirmer le diagnostic à l'écho et infiltrer de manière précise votre malade et ainsi le gérer quasiment de A à Z.
Une deuxième injection peut être réalisée à 4 ou 6 semaines si les symptômes persistent, au delà : demandez un avis chirurgical, ne réalisez pas 3 infiltrations.
3ème intention :
Chirurgie : demandez un avis après 4 à 6 semaines d'un traitement médical bien conduit incluant infiltration(s).
"Règle des 6" :
STEP 1 : ATTELLE + AINS 6 semaines
STEP 2 : INFILTRATION +/- 2ème à 6 semaines
STEP 3 : INDICATION CHIRURGICALE 6 semaines après infiltration si échec
Si vous n'infiltrez pas, vous pouvez aussi adresser le patient pour infiltration au chirurgien de la main qui pourra ensuite éventuellement surveiller l'évolution et décider d'une indication chirurgicale.
Pour en savoir plus :
Recommandations européennes du traitement de la tendinite de De Quervain
Lorsque vous rédigez l'ordonnance d'attelle pour Mme Q. son mari vous interpelle.
"Dites Docteur, je peux vous montrer ma main droite ?"
Vous levez la tête, regardez Mr Q... (spoiler doublon de consult...) "Mais bien sûr, je vais voir votre main Mr Q, je termine l'ordonnance, cependant la prochaine fois, prenez deux rendez-vous" 😁
Sa femme vous remercie et vous précise que son mari s'est fait mal en tombant de vélo il y a 10 jours lors d'une randonnée VTT en montagne.
"Je le filmais en train de faire du vélo sur une roue et il est tombé par terre, tenez j'ai la photo pile au moment où sa main gauche touche le sol, regardez"
Vous l'examinez et retrouvez une douleur exquise à ce niveau :
Quel diagnostic évoquez-vous ?
La bonne réponse est C.
Réponse A : la fracture du scaphoïde présente le même mécanisme fonctionnel avec chute sur la paume de la main. Cependant, il est peu probable que le patient ait une telle fracture sans plus de répercussion en terme d'indolence et de fonction du poignet et qu'il consulte 10 jours après... Ceux et celles d'entre vous qui ont coché cette réponse n'ont pas complètement tord non plus d'y penser mais nous avons choisi de ne pas la retenir dans les bonnes réponses car la zone palpée douloureuse ne correspond pas du tout à celle retrouvée dans une fracture du scaphoïde.
Je vous montre dans cette vidéo où se situe la douleur projetée dans une fracture du scaphoïde :
Réponse B : fracture de l'ulna, la zone palpée ne correspond pas à l'ulna. Comme pour la fracture du scaphoïde, l'impotence dans ces fractures est telle que le patient attend rarement 10 jours pour consulter...
Réponse C : L'entorse scapholunaire survient à la suite d'une chute assez violente sur le poignet (c'est le cas sur la photo), sur le coup le patient ressent une vive douleur mais les signes cliniques sont souvent modestes et l'impotence n'est pas majeure d'emblée. Les patients peuvent donc tout à fait consulter à distance du traumatisme. Par ailleurs, ils peuvent avoir bénéficié d'une radiographie du poignet normale ce qui est un piège classique de l'entorse scapholunaire. Autre élément classique et cela constitue même le maître symptôme : la douleur est élective et très précisément située sur la zone décrite sur la photo. Cette zone est appelée "fossette de crucifixion" 👇
Je vous explique dans la video suivant comment faire le diagnostic d'une entorse scapholunaire 👇
L'arthroscanner est l'examen de référence pour rechercher ce type d'entorse. Comme pour les ténosynovites, l'échographie au cabinet, pour ceux qui s'y forme, peut être très utile afin d'affirmer le diagnostic ! En effet, l'anamnèse est souvent typique, la zone douloureuse à explorer est très précise et les lésions sont très accessibles aux ultra sons, voici ce que l'on peut observer :
Réponse D : fracture du IIIème métacarpe. Là aussi, la zone douloureuse ne correspond pas au IIIème métacarpe. Voici une "astuce" pour rapidement voir si un métacarpe est fracturé. C'est le signe de "la cascade des doigts". La main étant posée avec la face palmaire vers le haut, du deuxième au cinquième doigt, il doit y avoir une augmentation subtile de la flexion et toute anomalie dans cette transition représente généralement une pathologie sous-jacente des métacarpes ou des phalanges.
Vous avez finalement adressé Mr Q. au chirurgien de la main qui l'a pris en charge pour réparation chirurgicale de cette entorse scapholunaire. En effet le diagnostic précoce des entorses scapholunaires, vous explique t'il dans son courrier, est très important. Vues précocement, ces lésions peuvent plus facilement cicatriser ! Ignorées, elles induisent un SLAC wrist (scapholunate advanced collapse) avec raideur du poignet très handicapante et très difficilement corrigeable chirurgicalement.
Vous revoyez finalement Mr Gérard, 3 mois après accompagné de sa mère qui en voulant refaire son lit s'est raccrochée son doigt dans son drap (... décidément !)
Voici le doigt de la mère de Mr Q. qui n'arrive plus à "étendre sa dernière phalange" :
Quel est votre diagnostic ?
La bonne réponse est B.
Réponse A : Le Jersey finger ressemble dans la présentation clinique au mallet finger avec une dernière phalange en flexion. Cependant, il ne s'agit pas du tout du même mécanisme lésionnel et de la même anomalie lors du testing. Le Jersey finger est beaucoup plus rare que le mallet finger. Le jersey finger consiste en une rupture du fléchisseur profond des doigts secondaire à un mécanisme d'hyper extension forcée de l'Interphalangienne distale (IPD) rendant la flexion active impossible de l'IPD.
Réponse B : mallet finger, il s'agit de la lésion la plus fréquente aussi bien dans la pratique sportive que dans les tâches de la vie quotidienne comme ici en refaisant son lit pour la mère de Mr Q.
Réponse C : doigt en boutonnière, il s'agit là aussi d'une déformation suite à un traumatisme des doigts mais la déformation n'est pas une flexion de l'IPD mais une flexion de l'IPP... associée à une extension de l'IPD. La déformation en boutonnière est due à une lésion de la bandelette centrale de l’extenseur rencontrée dans les sports de contact ou de ballon. Les bandelettes latérales intactes sont insérées sur la phalange distale. Elles se luxent progressivement en palmaire de l’articulation interphalangienne proximale, et exercent une traction sur l’articulation interphalangienne distale. On obtient ainsi une flexion de l’articulation IPP et une hyperextension de l’articulation IPD 👇
Dans la video suivante, je vous explique comment tester les tendons des doigts 👇
Voilà nous arrivons à la fin de ce cas clinique sur certaines pathologies fréquentes de la main et du poignet. Si vous voulez refaire un tour de l'examen du poignet : zone anatomique par zone anatomique, regardez cette video où j'examine une main en passant en revue les tests et examens cliniques. Vous pouvez agrandir la video en cliquant sur cette icône en passant la souris à la partie inférieure de la video.
QUESTION MÉMOIRE :
A la demande de plusieurs d'entre vous, nous débutons notre "QCM MÉMORISATION", chaque semaine à la fin de chaque cas clinique, nous vous poserons un court QCM sur un des thèmes abordés les semaines précédentes. Si vous n'avez pas encore fait ce thème en question, vous pouvez vous tester quand même.
Cette semaine, retour sur les lombalgies aiguës, voici donc notre question.
Parmi les affirmations suivantes, lesquelles sont vraies ?
Les bonnes réponses sont A et D.
Pour voir les explications des réponses, rendez-vous dans les cas cliniques de la semaine 1 Lombalgie aiguë : diagnostic et de la semaine 2 : lombalgie aiguë : traitement.
A la semaine prochaine !
Vous êtes dans un groupe de pairs ou dans une maison médicale ou vous voulez tout simplement partager notre concept de cas cliniques à un de vos amis collègues ?
Prenez en photo ce QR code et envoyez lui par sms 😀 :
LES 10 POINTS CLEFS :
1) Une douleur non traumatique à la base du pouce peut être une rhizarthrose ou une ténosynovite de De Quervain.
2) Le test de Finkelstein est sensible et spécifique pour identifier la ténosynovite de De Quervain, tandis que la manoeuvre du rabot (grinding test des anglosaxons) peut aider à identifier l'arthrose trapézométacarpienne.
3) La tendinite De Quervain est traitée avec des AINS et une immobilisation (attelle de De Quervain sans prendre l'IP) ; en l'absence d'amélioration, une injection de cortisone peut être envisagée à 6 semaines puis en l'absence d'amélioration 6 semaines après l'infiltration : soit 2ème infiltration soit avis chirurgical.
4) L'entorse scapholunaire = chute sur le poignet en extension + douleur exquise sur la fossette de crucifixion + test de Watson positif => Arthroscanner dans les 15 jours => immobilisation +/_ chirurgie. Si retard diagnostique = instabilité du carpe sévère (SLAC wrist) très handicapante.
5) Mallet finger = bcp plus fréquent que jersey finger = rupture de l'extenseur = classiquement le traitement est une attelle (de stack) en extension 6 semaines H24 puis 6 semaines la nuit "règle des 6".
6) Le Jersey finger est beaucoup plus rare que le mallet finger. Le jersey finger consiste en une rupture du fléchisseur profond des doigts secondaire à un mécanisme d'hyperextension forcée de l'Interphalangienne distale (IPD) rendant la flexion active impossible de l'IPD. Adresser au chirurgien de la main systématiquement car le traitement est lui plutôt chirurgical.
7) Le syndrome du canal carpien donne des douleurs de la main, nocturnes avec paresthésies dans le nerf médian. Les test de Tinel et Phanel sont positifs mais leur négativité n'exclue pas le diagnostic. Si suspicion : faire EMG bilateral et comparatif incluant le nerf ulnaire au coude puis adresser au chirurgien de la main.
8) Sd canal carpien : EMG anormal = traitement chirurgical. Si atrophie cliniquement visible de l'éminence thénar = preuve clinique de souffrance musculaire ... EMG n'est plus trop utile car on s'est forcément qu'il y a une souffrance nerveuse puisqu'elle a entraîné une amyotrophie ... = seul intérêt de l'EMG dans ce cas : médico-legal avant chirurgie.
9) Sd canal carpien : EMG normal = traitement conservateur => attelle de repos nocturne, Infiltrations, AINS. Si pas d'amélioration à 6 mois = adresser au chirurgien
10) Si vous ne savez pas comment immobiliser en urgence un poignet ou des doigts, retenez que la position d'immobilisation la plus sûre est une légère extension du poignet, les MCP en flexion à 90° et les IPP et IPD en extension (position de la plus grande longueur des tendons : évite les rétractions +++)
LA FICHE DE RECO SYNTHETISEE : (cliquez sur la fiche pour accéder à celle-ci avec les liens inclus)
Les 5 différences entre ténosynovite de De Quervain et rhizarthrose :
Le syndrome du canal carpien :
Le mallet finger :
Le jersey finger :
La recommandation de référence disponible concerne la ténosynovite de De Quervain éditée par "European HANDGUIDE Group" :
Recommandations européennes du traitement de la tendinite de De Quervain