Examen du genou en médecine générale
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Épisode 3 : Prise en charge du genou douloureux aigu



La phrase du jour :

 

« Pour prendre en charge correctement un patient se présentant avec une douleur aiguë du genou, il faut chercher à comprendre le mode d’apparition de la douleur, puis sa localisation, pour enfin comprendre son retentissement et la plainte du patient. » 

 

Nous allons rappeler dans cet épisode les grands principes, les choses à faire systématiquement, les choses qu’il ne faut absolument pas manquer, et les petites astuces à appliquer pour chaque patient.

Let’s go ! 🚀

Vous êtes en cabinet de médecine générale de ville ou de zone semi-rurale, et votre patient se présente avec un genou douloureux depuis quelques jours. C’est bien un genou douloureux AIGU. Vos réflexes doivent être :

  • Rechercher un événement déclencheur : traumatisme, effort intense, affection générale… ?
  • Localiser la douleur et rechercher des symptômes associés (épanchement, blocages, dérobements)

Parmi les traumatismes de genou, on distingue les traumatismes directs (choc reçu par un élément exogène) et les traumatismes indirects, parmi lesquels l’entorse est le phénomène le plus fréquent. Pour rappel, on distingue 3 stades d’entorse :

  • ENTORSE BENIGNE : étirement d’un ligament collatéral
  • ENTORSE MOYENNE : étirement + déchirure partielle d’un ligament collatéral
  • ENTORSE GRAVE : rupture d’un ligament collatéral + rupture d’un ligament croisé

A/ EPANCHEMENT :

En l’absence de traumatisme un épanchement peut être de plusieurs nature, que vous révèlera une ponction articulaire :

  • Epanchement mécanique (poussée d’arthrose)
  • Epanchement inflammatoire (poussée de CCA ou de Goutte)
  • Hémarthrose sans traumatisme

Une hémarthrose atraumatique, a fortiori des répétitions de cette hémarthrose, doivent vous faire évoquer une hémophilie, une synovite villo-nodulaire ou une autre pathologie synoviale.

LE CAS TYPIQUE : Gros genou douloureux

  • Patient jeune (40 ans)
  • Volumineux épanchement du genou depuis plusieurs jours
  • Parfois terrain goutteux (alimentation, terrain familial, déjà des poussées sur d’autres articulations)
  • Ponction retrouve des cristaux (urate de sodium ou pyrophosphate de calcium)

LE SAVIEZ-VOUS ? 🧐 En cas de traumatisme, on estime que l’hémarthrose secondaire est liée dans 75% des cas à une rupture du Ligament Croisé Antérieur, et dans 25% des cas à une luxation de rotule.

Toutes les ruptures du LCA n’engendrent pas systématiquement une hémarthrose. C’est la synoviale qui entoure le LCA qui peut être à l’origine de ce saignement.

ATTENTION : n’oubliez pas qu’en cas d’hémarthrose sur un genou traumatique avec choc direct ou indirect, la FRACTURE reste la première chose à éliminer !

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Radiographie d’une fracture du massif des épines tibiales

 

B/ BLOCAGE :

Le phénomène de blocage est souvent rapporté par les patients, qui ne peuvent plus étendre complètement le genou (on parle de flessum), ou alors qui ne peuvent pas le plier entièrement. Lorsque le déficit d’extension n’est pas réductible à l’examen clinique, on parle de flessum irréductible : dans ce cas, il existe un obstacle mécanique à l’extension dans l’articulation du genou. A contrario, il s’agit parfois d’une attitude antalgique, que l’examinateur peut corriger. On parle alors de flessum antalgique : l’articulation est libre, et rien n’entrave l’extension complète, sinon la douleur ressentie par le patient.

Une lésion méniscale peut être à l’origine de véritables blocages, en fonction de son importance. Ci-contre, une déchirure radiaire en vue arthroscopique, qui peut expliquer un pseudoblocage par le retournement transitoire de la languette méniscale lors d’un effort important. Lorsque la lésion rend mobile une partie importante du ménisque, on peut même observer une luxation en anse de seau. 

 

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Luxation méniscale en anse de seau

LE CAS TYPIQUE : Luxation méniscale en anse de seau

  • Patient actif (20-60 ans)
  • Douleur au genou pré-existante, depuis quelques jours/semaines, parfois lésion méniscale identifiée
  • Effort un peu plus important (hyperflexion, réception d’un saut)
  • Blocage en flessum irréductible brutal+++

CONDUITE A TENIR :

  • Rassurer +++ Ne pas contre-indiquer l’appui, mais selon la douleur, avec des cannes à visée antalgique
  • Bilan radiographique standard pour un état des lieux articulaire (arthrose ?)
  • IRM en semi-urgence : identifier la lésion méniscale en vue d’un avis chirurgical
  • RDV en urgence chez un chirurgien orthopédiste. L’objectif est de tenter une suture méniscale si possible.

ATTENTION : Ne pas tenter absolument de réduire le flessum ! Cela ne sert à rien, car la plupart du temps, la luxation méniscale se réduit spontanément et le genou retrouve alors son extension complète. Pour faciliter cela, mettez le patient sur le ventre, et laissez-le se décontracter jusqu’à l’extension maximale, en le laissant s’aider de la gravité. Si la douleur est résistante aux antalgiques standards, adressez le patient vers un centre de traumatologie.

C/ DÉROBEMENT :

Plusieurs causes peuvent concourir à des phénomènes de dérobement. Il s’agit d’ailleurs d’un terme mal compris souvent par les patients, qui rapportent plutôt spontanément que leur genou « lâche ».

Pour faire simple, le phénomène de dérobement survient lorsque les éléments stabilisateurs du genou sont défaillants. On parle de stabilisateurs primaires pour les ligaments croisés et collatéraux, et de stabilisateurs secondaires pour l’appareil tendino-musculaire (quadriceps, tendon rotulien, etc) et capsulo-méniscal périphérique.

EN CONSEQUENCE => UN PATIENT PEUT AVOIR LE GENOU QUI LÂCHE SANS RUPTURE DE CROISÉ A L’IRM

Si vous disposez d’une IRM qui ne montre pas de rupture des ligaments croisés ou collatéraux, le plus souvent, le patient rapporte une sensation de dérobement liée à une sidération quadricipitale. Son incapacité à verrouiller solidement sa rotule en extension de jambe et appui monopodal, contraint son quadriceps à céder brutalement sous le poids du corps. Ainsi, il dit vrai quand il vous rapporte que son genou lâche ! Même si pour être exact, c’est son quadriceps qui lâche… 😅

 

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Illustration d’une hypotonie quadricipitale, incapable de contrebalancer le poids du corps.

LE CAS TYPIQUE : Sidération quadricipitale post-traumatique

  • Patient actif (20-60 ans)
  • Traumatisme du genou indirect mais pas d’entorse grave à l’examen clinique initial
  • Immobilisation prolongée > 15 jours en attelle d’extension
  • Sensation de dérobement à la levée de l’attelle
  • IRM de contrôle : pas de rupture du LCA !
  • => CAT kinésithérapie pour renforcement du verrouillage quadricpital

QUELLE THERAPEUTIQUE ENGAGER ?

Voici quelques principes universels, à adapter au besoin :

A/ En cas d’entorse de genou

  • IMMOBILISATION : recommandée, quelle que soit la gravité de l’entorse, mais souvenez-vous, pas au-delà de 10 jours ! Prévenez le patient de la nécessité d’ôter l’attelle au-delà.
  • CONSERVATION DE L’APPUI : autant que possible. Sinon, thrombo-prophylaxie, après avoir éliminé une fracture…
  • AINS, GLAÇAGE +++
  • ARREÊT DE SPORT 6 SEMAINES quel que soit le stade de l’entorse (délai pour la cicatrisation ligamentaire)
  • KINÉSITHÉRAPIE : pas obligatoire, en tout cas jamais temps que les douleurs persistent. A envisager à partir de 2-3 semaines, surtout si le patient rechigne à se séparer de l’attelle.
  • IMAGERIE : radiographies standards (toujours !) / IRM si entorse grave pour rechercher ou confirmer une rupture du LCA

QUE FAIRE SI LA DOULEUR PERSISTE A 6 SEMAINES DE L’ENTORSE ?

C’est le moment de vérifier qu’on n’a rien laissé passer : relecture des RADIOS à la recherche d’une fracture, ré-examen du genou (localisation plus précise des douleurs ? Tiroir antérieur ? Signes inflammatoires ?). L’IRM reste un bon examen (fracture de fatigue, contusion osseuse importante) mais la SCINTIGRAPHIE OSSEUSE vous aidera dans la recherche d’une algodystrophie (terrain anxieux, ressenti hyperalgique de l’entorse avec mauvaise évolution)

B/ En cas de traumatisme direct :

La prise en charge est plus simple : bilan radiographique pour rechercher une fracture / pas d’immobilisation systématique / traitement antalgique / glaçage…

Les douleurs disparaissent dans les 10 jours.

C/ En l’absence de traumatisme

  • Interrogatoire précis (parfois c’est une hyperflexion de genou passée inaperçue !)
  • En présence d’un épanchement : ponction avec recherche de micro-cristaux
  • BILAN RADIOGRAPHIQUE est toujours nécessaire (recherche d’arthrose ?)
  • Après localisation de la douleur, une IRM peut rechercher une lésion méniscale, une ECHOGRAPHIE peut être utile et rapidement obtenue, pour rechercher des signes de tendinites péri-articulaires.
  • Le traitement est fonctionnel la plupart du temps, en évitant toujours au maximum l’immobilisation !!

Retrouvez ici une fiche de synthèse récapitulant un arbre décisionnel possible sur le genou douloureux aigu : Conduite à tenir devant un genou douloureux aigu

Voilà la partie texte de cet épisode 3 est terminée.
Installez-vous confortablement ☕️ ☕️ ☕️ et visionnez la vidéo du Dr Walbron, qui vous explique tout cela en détail.
Bonne projection 😉
Rendez-vous après la vidéo pour les QCM !
- Pas le temps pour la vidéo ?
- Ce n'est pas grave, faites une pause, vous pourrez reprendre plus tard nous mesurons le temps de formation, chacun son rythme !